L’autre jour, je regardais l’une de mes peintures et me désolais de trouver les traits trop mous, pas assez affirmés. Le premier remède semblait simple : se débarrasser rapidement du travail incriminé, ce que j’adore faire, et que j’ai fait aussitôt… Cependant restait à régler le problème technique que j’avais rencontré : comment faire en sorte que mon trait soit plus ferme ? Dans ces cas-là, en outre, des tas de questions s’immiscent dans mon esprit : suis-je vraiment capable de peindre ? N’est-ce pas la preuve que je n’y arriverais jamais ? etc. Je ne sais pas ce qu’il en est pour les autres artistes, mais ce qui nourrit le plus mon art est peut-être ce doute qui me ronge cycliquement…
Et puis, un autre jour, la solution évidente m’est apparue : je n’avais simplement pas utilisé le bon pinceau : en prenant un pinceau plat aux poils assez rigides, cela devenait simple de vouloir son trait du début à la fin d’une toile assez grande. Un des moyens de sortir d’une impasse en peinture pour moi est de changer quelque chose à ma routine. Ici je m’obstinais à utiliser un pinceau chinois, auquel j’étais habituée, et j’avais perdu de vue qu’il n’était pas adapté à ce que je voulais faire. Je pense que nous avons tous de ces outils fétiches, qui ont jour ont fait corps avec nous, ont comme transvasé sur le papier ou la toile l’impression qui habitait notre esprit, et qui finissent par nous empêcher de progresser.
Il faut donc avoir un grand nombre de pinceaux à disposition chez soi : des chers, avec des poils rares, des petits, des grands, des pinceaux de peintres en bâtiment, des précieux pour la calligraphie, des vieux et usés, etc. En effet la peinture reste aussi un artisanat, un faire, et à chacun d’eux il s’agit d’adapter son geste. Fabienne Verdier, dans son livre autobiographique, raconte que son apprentissage de la peinture a commencé par des traits indéfiniment répétés : car le corps intervient dans l’acte de peindre, et il s’agit aussi de maîtriser celui-ci lorsque l’on crée. Les muscles du bras doivent répondre avec finesse, exactement, aux demandes de l’esprit. C’est un acte total.
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Pierre (vendredi, 29 octobre 2010 20:42)
Belle réflexion; saine et simple; dans laquelle je me retrouve.
Traitant des liens entre la peinture, les outils, le corps et l'esprit du peintre.
Un vaste sujet. Le coeur du problème, s'il y en a un.
raphaële Colombi (samedi, 30 octobre 2010 11:06)
Merci, Pierre. Oui, c'est tout ce qui fait que je trouve essentiel pour moi de continuer la peinture... En cherchant le lien pour cet article, ça m'a fait plaisir de constater que Fabienne verdier écrit la même chose, sur l'acte de peindre. Elle met aussi des citations de peintres chinois que je contresignerais bien !